Premier test | Shimano XTR M9100 : le nouveau groupe vedette à l’épreuve en Slovénie
Par Jurgen Groenwals -
Nous regardons avec admiration la rivière Soča et sa couleur émeraude, où les kayakistes s’élancent avec leurs embarcations. Pour notre part, nous venons de finir l’un des plus beaux sentiers de Slovénie. Il nous a coûté une longue montée raide, mais la récompensa a été à la hauteur, avec plus d’une heure de descente à la clé. Voilà, le décor est planté : c’est là que nous avons pu essayer pour la toute première fois le nouveau groupe Shimano XTR M9100 en compagnie d’une poignée de journalistes et des équipes techniques de la marque. Suivez-nous et découvrez nos premières impressions !
Nous avions déjà eu l’occasion de vous présenter assez largement le nouveau groupe Shimano XTR M9100 en 12 vitesses lors de sa toute première sortie à l’occasion de la coupe du Monde de Nove Mesto au mois de mai. Nous n’allons donc pas revenir sur tous les détails techniques ici, afin de nous concentrer sur la raison de notre déplacement en Slovénie : vous confier nos impressions après un premier roulage de ce nouveau groupe phare du géant japonais. Ou plutôt de CES nouveaux groupes phares, puisque le nouvel XTR se décline en plusieurs versions.
Au cours de deux journées de ride, nous allons successivement avoir l’occasion de prendre les commandes du modèle 1×12 XC, le Shimano XTR M9100 Race, puis de la déclinaison enduro, le M9120. Enfin, profitant d’un petit moment de répit, nous avons passé du temps avec les responsables du projet XTR, Henry Bosch et Takao Harada, pour connaître le « pourquoi du comment ».
Pour rentrer dans le vif du sujet, passons à la page suivante >>>
Premier essai | Shimano XTR M9100 Race & Shimano XTR M9120
Avec le nouvel XTR M9100, Shimano mise sur trois types de transmissions différents et deux types de freins, dans un esprit de segmentation et de spécialisation de son groupe le plus pointu. Crosseurs, marathoniens et enduristes sont couverts par l’offre XTR, soit ce que Shimano décrit comme les trois plus grands foyers de pratique, avec une orientation light pour le XC, particulièrement versatile pour le marathon et tournée vers la solidité et l’endurance (notamment au niveau du freinage) pour l’enduro.
En compagnie de quelques médias triés sur le volet, Vojo a eu l’opportunité de tester les nouveaux groupes Shimano XTR M9100 Race et les freins de la version XTR M9120 enduro sur de fantastiques sentiers slovènes. Après quatre jours particulièrement riches, voici nos premières impressions.
L’échauffement
Dans le shuttle qui nous emmène vers notre point de départ, nous avons droit à une petite leçon d’histoire de la route et de la chapelle russes. Le col de Vršič, qui relie Kranjska Gora à Trenta, a joué un rôle important dans l’histoire de la Slovénie. Pendant la première guerre mondiale, une bataille âpre et longue a eu lieu ici. Comme il n’était pas évident d’emmener des soldats dans la vallée de la Soča, l’armée autrichienne a décidé de construire une route de montagne au-dessus de Vršič, avec l’aide de prisonniers de guerre. En mars 1916, la nature s’est montrée impitoyable et un drame a frappé ce chantier. Une énorme avalanche a eu lieu, au cours de laquelle plus de 300 personnes ont péri ; principalement des prisonniers russes. D’où l’origine de la fameuse chapelle, qui honore leur mémoire et de cette route qui porte aujourd’hui leur nom.
Voilà de quoi donner encore un peu plus de profondeur à ce décor majestueux des Alpes Juliennes autour de Kranjska Gora, qui va nous servir de cadre pour des choses beaucoup plus agréables et une première sortie pour se dégourdir les jambes et les maillons sur une piste amusante et pas trop technique dans le parc national du Triglav.
Notre monture du jour : un KTM Scarp. Une machine bien typée XC, donc, qui est montée avec le groupe Shimano XTR M9100 Race. La nouvelle cassette 12 vitesses10-51 est ici couplée à un plateau de 32 dents. Autant dire que si on ne s’en sort pas dans une côte, c’est plus parce que c’est trop raide, qu’on n’a pas les jambes ou qu’il n’y a plus d’adhérence… qu’à cause d’un souci du côté des rapports et de la transmission.
Nous passons d’abord dans les mains de l’assistance Fox pour un réglage des suspensions, puis nous allons du côté des techniciens de chez Shimano pour régler plus finement les composants XTR à notre goût et pour être sûr de bien profiter de toutes les possibilités d’ajustement.
Ce qui est clair dès le départ lors de cette phase de réglages, c’est que le nouveau collier i-Spec EV rend encore plus facile l’ajustement de la position du shifter. 14mm en latéral et 60 degrés pour l’angle : dur de ne pas trouver la position qui colle aux goûts de chacun. Et cela pour le shiter lui-même, mais aussi pour les leviers de freins. Vous noterez aussi au passage le petit insert en caoutchouc qui évite tout glissement des doigts, et qui se révèle bien agréable à l’usage.
On profite aussi de cette présentation pour regarder plus en détails et toucher le nouveau levier « push-push » prévu pour le dérailleur avant, puisque le XTR M9100 est toujours prévu aussi dans une version double plateau, étiquetée « marathon ». On pousse une fois pour monter sur le grand plateau, et une deuxième pour redescendre, un peu comme certains blocages de fourches. Simple et efficace. Mais, après le dérailleur avant side-swing, on ne peut s’empêcher de regretter que ce genre d’évolution arrive quand tout le monde ou presque roule en mono-plateau…
Le dérailleur arrière mérite aussi qu’on s’y attarde. Ou plutôt LES dérailleurs arrière, puisqu’ils sont au nombre de trois.
- RD-M9100 SGS : avec sa « super grande chape », c’est sans doute celui qu’on rencontrera le plus, puisqu’il est destiné à un usage 1×12 vitesses, avec la cassette 10-51. Il fonctionne aussi avec la cassette 10-45 en 12 et 11 vitesses.
- RD-M9100 GS : avec sa chape plus courte, il se destine à un usage 1×11 et 1×12 avec la cassette 10-45. Plus court, il se destine aux pilotes plus agressifs.
- RD-M9120 : à utiliser en 1×12 et 2×12 avec la cassette 10-45.
Tous ont la technologie Shadow Plus qui aide à limiter les mouvements de chaîne (moins de bruit… et surtout de déraillements potentiels), et on note que les galets grandissent en passant de 11 à 13 dents. Espérons qu’on ne rencontre pas le même souci que chez Sram, où cet agrandissement avait été fait sans changement de la conception des galets, qui s’étaient avérés trop souples et qui ont été source de nombreux problèmes avant d’être modifiés récemment.
La première montée est très lisse, à flanc de montagne. Mais elle est aussi très raide par endroits. Nous essayons de prendre en défaut la transmission en ne cessant de changer les rapports sous la contrainte… mais rien n’y fait, le dérailleur réagit toujours vite et même si nous y mettons beaucoup de mauvaise volonté, les vitesses ne sont jamais prises en défaut. Intéressant.
Connaissez-vous ce proverbe qui dit qu’une chaîne a seulement la force de son maillon le plus faible ? Justement, ce n’est peut-être pas le composant le plus sexy d’une transmission VTT, et on a parfois tendance à l’oublier, mais la chaîne a fait l’objet d’énormément d’attention de la part de Shimano. Les parties internes ont été retravaillées, de sorte à vraiment épouser parfaitement les dents des plateaux et de la cassette. Cela permet de réduire les micro vibrations et d’obtenir à la fois des changements de vitesses plus doux et plus rapides. Mine de rien, ces changements jouent aussi un rôle dans cette première impression mêlant douceur et précision.
Une nouvelle génération de SwitchLink (le maillon rapide de Shimano) arrive aussi, et ce principe se généralise (enfin) sur toutes les chaînes de la marque.
Après un peu plus d’une heure, nous voilà revenus à notre point de départ. L’échauffement a été court, mais déjà les premières sensations avec le Shimano XTR M9100 Race sont prometteuses. Et les freins, encore tout neufs, ont pu être rodés. Tant mieux, car on nous annonce de quoi bien les tester le lendemain…
Un trail au cœur des trois frontières
Au menu aujourd’hui, une longue montée vers les trois frontières, une zone où Slovénie, Autriche et Italie se touchent. Ensuite, nous auront droit à une très longue descente. Tout comme la veille, nous sommes à nouveau impressionnés d’emblée par la rapidité et la précision avec lesquelles le groupe Shimano XTR M9100 Race fonctionne. Les précédentes versions fonctionnaient toutes déjà de manière exemplaire, mais on constate que Shimano parvient à chaque fois à raffiner encore un peu plus les choses. C’est de l’ordre du détail, mais on imagine le travail qu’il y a derrière.
La dernière partie de l’ascension monte de façon très raide le long d’un téléski. L’idéal pour passer sur le nouveau grand pignon de 51 dents, et cela se fait sans sentir de différence avec les autres pignons. C’est l’occasion de se pencher un peu plus sur la conception de la cassette.
Contrairement à Sram, où la cassette est usinée dans un bloc d’acier avec simplement un dernier grand pignon de 50 dents en aluminium, Shimano opte pour une construction en plusieurs parties avec de l’acier pour les premiers pignons, puis du titane et enfin de l’aluminium. L’objectif est de trouver à chaque fois le meilleur compromis poids/longévité. Au final, on arrive à un poids de 375g, soit quasiment équivalent à la Sram XX1 Eagle.
C’est aussi l’occasion de se pencher sur la nouvelle interface de montage de ces fameuses nouvelles cassettes XTR sur le corps de roue-libre, nécessaire afin de proposer une plage de développements la plus large possible, ce qui était un des points sur lesquels la précédente génération commençait à marquer le pas sur la concurrence (Sram Eagle pour ne pas la citer).
Dix dents en guise de petit pignon et 12 vitesses rendent techniquement impossible le montage de la cassette sur le corps de roue-libre Shimano traditionnel. Après plus de 20 ans de bons et loyaux services de son prédécesseur « HG », les ingénieurs japonais ont développé un nouveau format appelé Micro Spline. Il utilise 23 petites rainures qui répartissent mieux les contraintes, de sorte que le corps est désormais en aluminium. D’autres le faisaient en HG, mais Shimano s’y était toujours refusé pour des raisons de fiabilité et pour éviter les fameuses marques que beaucoup d’entre-vous connaissent certainement. Très court et compact, le Micro Spline permet aussi d’écarter les flasques du moyeu nettement plus, afin d’obtenir une roue plus rigide grâce à des rayons ayant un angle plus important.
Mis à part Shimano, DT Swiss est actuellement la seule marque à avoir eu officiellement la licence pour produire un corps de roue-libre Micro-Spline
Mis à part Shimano, DT Swiss est actuellement la seule marque à avoir eu officiellement la licence pour produire ce dispositif. Pourquoi DT ? Car il s’agit actuellement d’un des plus gros fournisseurs (si pas LE plus gros) de roues haut de gamme, mais aussi car leur système de roue-libre cranté (rachet system) n’est pas sans rappeler celui développé par Shimano sur les nouveaux moyeux XTR, et ce serait aussi celui qui conviendrait le mieux au Micro Spline, contrairement aux systèmes à cliquets.
D’autres marques pourraient suivre et obtenir le feu vert de Shimano, mais il ne s’agit pas d’un standard complètement ouvert comme pour le précédent ou pour le XD de Sram. Il sera important de surveiller ce point car cela pourrait être un facteur bloquant pour beaucoup de personnes souhaitant investir dans ce nouveau groupe, réticentes à l’idée de devoir investir aussi dans de nouvelles roues ou à tout le moins un nouveau montage de roue arrière.
A propos des moyeux Shimano, ceux-ci sont bien évidemment tout à fait nouveaux. Outre le Micro Spline, ils sont aussi dotés de la technologie Scylence… comme silence. Et c’est vrai que ça marche : on n’entend plus rien du tout ! Les amateurs de cliquetis bruyants et de « zzzzzzz » mélodiques en seront pour leurs frais. Par contre, ceux qui préfèrent se concentrer sur leur pilotage et sur les bruits de la nature seront comblés. Cerise sur le gâteau, l’enclenchement est aussi très rapide.
Au niveau du pédalier, il n’y a plus d’étoile intégrée à la manivelle comme avant, mais un système Direct Mount (comme chez Sram, Race Face et bien d’autres) qui permet beaucoup plus de polyvalence en permettant de passer du mono au double ou d’aller sur de tout petits plateaux sans devoir changer de manivelles. L’outil spécial dont vous avez besoin pour le changement est fourni avec le pédalier.
Bon, on s’est un peu écarté du terrain… mais vous ne réfléchissez jamais pendant une longue montée ? En attendant, nous voici au sommet. Nous regardons les trois pays qui nous entourent, on enfile nos petites genouillères (même sur un XC, pour ce genre de terrain, on n’est jamais trop prudent), et nous nous préparons à entamer la vraie partie de plaisir avec la descente. Ici, ce sont les freins sur lesquels nous allons nous concentrer.
Les nouveaux freins Shimano XTR M9100 Race qui sont montés sur notre KTM Scarp comptent deux pistons et leur objectif est d’être les plus légers possible. L’étrier est entièrement en aluminium et il est très proche de celui du groupe Dura-Ace de route, tout comme les pistons en céramique et les plaquettes utilisées. Espérons que Shimano aura retenu l’expérience des précédents XT et XTR qui avaient connu pas mal de soucis au début, mais en tout cas ici ces premiers exemplaires freinaient bien et la similitude avec les Dura-Ace est rassurante. Dernier détail : ils n’existent qu’en version Postmount.
Tant qu’on parle des freins, faisons un petit bond en avant dans le temps pour vous dire que le 4e jour, nous avons vraiment eu l’occasion de torturer les étriers Race. Il avait plu continuellement et les conditions étaient terribles. Cette fois au guidon d’un Scott Spark RC en disques de 160 avant/arrière, nous avons entamé cette descente seulement à moitié rassuré. L’adhérence était précaire, mais la pente mettait les freins à rude épreuve. Eh bien nous avons vraiment pu compter sur un compromis dosage/puissance absolument parfait qui nous a permis d’être bien en confiance. Les sensations au niveau des leviers sont restées constantes de bout en bout et jamais la puissance n’a faibli.
Si nous devions trouver un point négatif, ce serait qu’il faut aller loin pour trouver le point de contact des plaquettes. La course morte est un peu longue à notre goût, ce qui signifie qu’il faut appuyer assez loin sur le levier avant qu’il se passe réellement quelque chose. Mais une fois ce fameux point de contact atteint, la rigidité des nouveaux leviers et leur onctuosité font leur effet, ce qui est un régal et le dosage parfait facile à trouver. Ce ne sont pas les plus puissants, mais ne dit-on pas que sans la maîtrise, la puissance n’est rien ?
Que retenir de ce premier contact avec la version Race du nouvel XTR ? Précise, silencieuse, efficace, la transmission raffine encore la notion de haut de gamme et offre enfin une plage de rapports qui permet vraiment de faire face à (quasi) toutes les situations en mono, même en montagne. Quant aux freins, ils répondent aussi présent dans leur créneau. Mais passons maintenant à la version enduro.
Shimano XTR M9120: Enduro time… pour les freins.
Pour cette deuxième journée consacrée plus typée enduro, c’est un Scott Genius qui sera notre « weapon of choice ». Par contre, il n’est pas équipé de la transmission M9120 enduro, mais du 9100 Race comme sur le KTM et seuls les freins sont issus de la version plus musclée. Dommage, nous étions curieux de voir comment la version 1×11 se comportait, mais ce sera pour une autre fois.
Pour commencer, devinez quoi ? Il va falloir monter ! Depuis Uccea vers Stomm, l’ascension traverse une forêt sombre jusqu’à Srpenica, et cela représente plus d’une heure de grimpette. Nous l’avons déjà vu lors de la première journée, et cela se confirme ici : le changement des rapports est impeccable en toutes circonstances, à tel point qu’on l’oublie presque, ce qui se permet de se concentrer sur son pédalage, la gestion de l’effort et de son alimentation.
Aujourd’hui, la vue est hélas bouchée par les nuages. Les chèvres nous accueillent joyeusement et sans crainte. La première partie de la descente se fait sur une sorte de sentier invisible, où les cailloux piégeurs sont cachés sous l’herbe. Les pièges sont nombreux, tout comme les risques de taper le dérailleur et les manivelles. Mais il en faut visiblement plus pour impressionner notre XTR…
Le meilleur est à venir, avec une descente longue et variée, qui nous prouve encore une fois que la Slovénie est un paradis pour le VTT. Le Scott Genius est pleinement dans son élément.
Comme la transmission se fait encore une fois totalement oublier, tant par son silence (changements de vitesse, roue-libre) que par sa précision, on peut se concentrer sur les freins XTR M9120, que nous n’avions pas sur notre vélo de la veille, ainsi que sur quelques autres détails périphériques au groupe. Avant cela, juste une réflexion : même si dans un coin de notre tête, on espère que Shimano sortira une version électronique de cet XTR, on peut dire qu’elle ne nous a pas vraiment manqué ici tant le système par câbles est bien au point.
La tige de selle Pro Koryak retient notre attention. Même si elle n’a que 120mm de course ici, ce qui est un peu peu pour le Genius (mais la marque d’accessoires de Shimano a depuis présenté des versions en 150 et même 170mm), son fonctionnement ne soulève aucune critique. Et on peut profiter aussi de la commande liée au groupe XTR et qui s’intègre harmonieusement au cockpit grâce à l’i-Spec EV qui offre aussi une large plage de réglages, comme pour le shifter placé à droite. On apprécie aussi que Shimano ait placé un caoutchouc nervuré pour améliorer le grip. Enfin, le guide-chaîne Shimano, pas indispensable car le maintien par le plateau est déjà très bon, offre une sécurité supplémentaire.
Mais venons-en au plus important, avec les freins M9120.
Contrairement au M9100 Race monobloc et 2 pistons, ainsi qu’à l’ancien frein XTR enduro, le M9120 Race est en deux parties et comporte 4 pistons. Le design s’inspire des Saint de DH/gros enduro, avec notamment des pistons de même diamètre, mais ce frein XTR est nettement plus léger, puisqu’un ensemble avant pèse moins de 250g contre plus de 300g pour un Saint.
Le design des plaquettes est très proche de celui des Saint également, mais les ailettes de refroidissement empêchent le montage de ces nouvelles garnitures XTR sur d’autres freins Shimano.
Le levier est très proche de celui de la version Race, avec un point d’appui sur le cintre près de la poignée, en plus du collier, pour augmenter la rigidité. Principale différence : le point de contact des plaquettes peut être ajusté et la garde du levier réglée sans outil. Le design incite à freiner à un seul doigt, voire deux, et les leviers sont en aluminium alors qu’ils sont en carbone sur le modèle Race.
Il ne faut pas très longtemps pour sentir la différence entre les M9120 d’enduro et les 9100 Race. Dès qu’on effleure le levier, la puissance est délivrée de façon plus directe. Il reste une certaine course morte, mais une fois au point de contact, la force de freinage supplémentaire est de suite perceptible. Si vous arrivez un peu vite dans un virage, que vous vous laissez surprendre par un obstacle, pas de souci, la force de décélération des freins XTR Enduro vous stoppera toujours… et seuls les pneus seront votre limite.
Ils semblent inépuisables, même en disques de 180mm, et même à la fin d’une descente très longue, on ne perçoit aucune surchauffe et le feeling au niveau du levier reste rigoureusement inchangé. Impressionnant et digne des Saint !
On termine par un petit mot sur les pédales, dont la surface de contact est agrandie. On ne va pas vous dire que cela se sent immédiatement et que c’est une révolution, mais ces petites évolutions permettent à Shimano de rester parmi les benchmarks du segment..
Verdict
Après quatre journées de roulage bien varié avec le groupe Shimano XTR M9100 Race et avec les deux versions des freins (Race et Enduro), nous n’avons pas été en mesure de mettre en défaut le nouveau groupe Shimano XTR. Le changement des rapports est particulièrement véloce, lisse, doux, silencieux. A chaque génération, on se demande comment il sera possible de faire mieux, et ils y arrivent. Par toutes petites touches, très subtiles, mais au final c’est perceptible. Et le 12 vitesses relance Shimano avec de fameuses armes dans la course face à Sram, qui avait gagné énormément de parts de marché ces dernières années dans le haut de gamme avec son groupe Eagle. Les freins Race fonctionnent très bien, mais ce sont les Enduro qui nous ont le plus impressionnés. Espérons qu’ils ne souffrent pas de maladies de jeunesse et ils pourront, eux aussi, devenir très vite des références. Bien sûr, 4 jours, c’est beaucoup trop court pour juger de la fiabilité et de la durabilité, mais nous allons très vite débuter un test longue durée sur nos terrains habituels. Par contre, on peut dire avec certitude que ce nouveau groupe Shimano XTR M9100 tient son rang et dispose des arguments nécessaires pour affronter son féroce concurrent. Et peut-être pour gagner…
Plus d’infos : www.ridextr.com
Et en (re)lisant notre présentation du groupe lors de sa sortie : dev.vojomag.com/presentation-shimano-xtr-m9100-12-vitesses-pour-le-xc-marathon-11-pour-lenduro/
Et ce n’est pas fini ! Pour que le nouvel XTR n’ait plus aucun secret pour vous, nous avons cuisiné ses concepteurs Takao Harada et Henry Bosch. Rendez-vous à la page suivante >>>
Interview | Une discussion animée avec les pères du Shimano XTR M9100
Outre l’essai des produits, nous avons profité de cette présentation du nouveau groupe Shimano XTR M9100 et de ses déclinaisons pour nous entretenir avec Takao Harada et Henry Bosch (ça ne s’invente pas), qui ne sont autres que les « pères » de ce nouvel XTR. Face au bus bleu Shimano, nous avons parlé vis, boulons, dents, choix de matériaux, concurrence avec Sram ou encore comment un Néerlandais et un Japonais travaillent ensemble sur un tel projet. Interview croisée :
Takao Harada, pouvez-vous vous présenter en quelques mots pour nos lecteurs ?
Takao Harada: “Je suis le chef produit Monde pour Shimano. J’ai d’abord travaillé au service qualité puis j’ai continué petit à petit mon cheminement dans l’entreprise. Au début je travaillais surtout sur les composants route, notamment le dernier groupe Dura-Ace et le Di2. Ensuite, je me suis occupé du XTR.”
Et vous-même, vous êtes plutôt passionné de route ou de VTT ?
Takao Harada: “Question difficile ! Les deux sont intéressants, mais je dois dire que mon cœur me porte plus vers le vélo de montagne. J’ai toujours roulé en VTT. Ce que j’aime, c’est monter au sommet d’une montagne, puis la descendre. Typiquement, au Japon, cela signifie grimper jusqu’à environ 2000m de haut – et il me faut parfois 6 à 7h pour le faire – puis s’offrir 30 minutes de belle descente. C’est typique du VTT old-school à la japonaise ! (rires)
Et vous, Henry ?
Henry Bosch: “J’ai vraiment grandi parmi les vélos. Mon père tenait un magasin de vélos et, après mes études, j’ai commencé à travailler dans l’industrie du vélo. Bricoler et vendre des deux-roues a toujours été une passion. J’ai commencé chez Shimano en tant que superviseur au service après-vente et garanties. J’ai ensuite été affecté 5 ans au contrôle qualité auprès des distributeurs d’Europe du Sud. Maintenant, je travaille sur le développement de nouveaux produits depuis bientôt 4 ans.”
Est-ce correct de dire que le nouveau groupe Shimano XTR M9100 a été co-développé par les Pays-Bas et le Japon ?
Henry Bosch: “C’est même plus que cela ! Nous avons encore un collègue chef produit aux USA. Nous nous réunissons régulièrement au Japon ou ailleurs dans le Monde pour discuter des nouveaux produits et concepts. Nick, notre collègue américain et moi-êmem, sommes les yeux et les oreilles de nos marchés. Nous transmettons ensuite tout cela au Japon afin de nourrir le développement des nouvelles pièces. Viennent ensuite d’importantes équipes en support, avec la R&D, les équipes d’ingénieurs, etc. »
Est-ce facile ou difficile de travailler sur trois continents comme vous le faites ?
Henry Bosch: “Eh bien maintenant je vais laisser mon cher Takao répondre !” (rires)
Takao Harada: “Oui, c’est une question d’habitude. Maintenant, je suis rompu au travail avec les Néerlandais et les Européens. Je suis impliqué dans le cyclisme sur route depuis longtemps et les Néerlandais y sont très présents. Je les trouve très bons pour traduire et sentir les réels besoins des consommateurs. Cela facilité ensuite beaucoup la tâche des équipes de conception et d’ingénierie. »
A propos du dernier XTR, pourquoi avoir dû attendre si longtemps ? Face à l’évolution de la concurrence, Shimano ne pouvait-il pas briser son sacro-saint cycle de remplacement des produits (XTR puis XT, puis SLX, etc. et la boucle recommence) ?
Takao Harada (qui réfléchit un moment): “Après chaque sortie d’un groupe, nous recommençons directement à penser à la sortie de son successeur. Nous nous fixons donc des objectifs en termes de produit et de délai. Mais avant tout, chez Shimano, nous ne sortons un produit que quand nous sommes à 100% sûrs de nous. Nous aurions peut-être pu avancer, mais nous avons encore noté des détails qui pouvaient être améliorés et nous nous en sommes donc tenus à notre agenda habituel. »
Quels étaient les trois points centraux dans la conception du nouveau XTR ?
Henry Bosch: « Vitesse, contrôle et focus. Par vitesse, on entend non seulement un changement de vitesses plus rapide et efficace, mais aussi un abaissement du poids et une optimisation de tous les détails. Pour le contrôle, on travaille surtout sur les freins et sur la sensation de maîtrise du vélo qu’ils doivent procurer. Enfin, pour ce qui est du « focus », on parle de tout ce qui va permettre au pilote de se concentrer uniquement sur son pilotage. Je pense notamment à notre technologie Scylence qui va permettre de ne pas être distrait par des bruits parasites, comme ceux de la roue-libre ou de la transmission. Un autre objectif quand on conçoit un groupe, c’est que tout fonctionne parfaitement ensemble et qu’il y ait une véritable unité entre des composants parfois très différents, notamment au niveau du look.”
Passons à un sujet sensible. Sram et le groupe Eagle…
Henry Bosch: “On ne va pas tourner autour du pot, Sram est en forme en ce moment. Beaucoup de vélos sont équipés en Sram Eagle dans le haut de gamme. Mais pour nous, il ne s’agit pas seulement de parts de marché. Shimano a plus de 25 ans d’expérience dans le VTT. Au cours de cette période, nous avons introduit plus de nouvelles technologies que quiconque. Avec le nouveau XTR, nous avons pris le temps d’étudier le marché et de voir quelle est la demande réelle. Nous avions déjà une offre mono-plateau sur le précédent XTR, mais avant de développer un tout nouveau groupe, nous devions être sûrs que cette tendance n’était pas volatile ou juste localisée sur quelques marchés. Finalement, le nouveau groupe XTR est aussi basé sur le 1X, mais nous offrons en plus bien de nombreuses autres options. Je pense que nous avons là de quoi entrevoir l’avenir avec sérénité.
Imaginez : j’ai un magasin de vélos et un client vient me voir pour acheter un nouveau VTT haut de gamme. Comment le convaincriez-vous de se tourner vers un modèle en XTR plutôt qu’en Sram Eagle ?
Henry Bosch: “Pour nous, la question ne se pose pas, c’est évident (rires) ! Plus sérieusement, si quelqu’un est satisfait avec Sram, il y a de grandes chances qu’il poursuive avec la marque. Et je ne vais pas dire à quelqu’un ce qu’il doit faire ou qu’il doit absolument changer. Il est surtout important que le revendeur connaisse bien son client. C’est exactement ce que nous faisons avec Shimano, en mettant tout en place pour connaître au mieux nos clients et nos revendeurs. C’est aussi pour cela que nous n’avons pas une seule proposition, mais plusieurs versions du groupe XTR, afin que chacun trouve chaussure à son pied. Et si vous cherchez un groupe avec un changement de vitesses performant, silencieux, fiable et aussi, ce qui est très important, des freins puissants, il y a de grande chance que vous alliez vers le Shimano XTR. »
Êtes-vous vraiment convaincus qu’il y a encore une clientèle pour une configuration 2X ? Si vous n’arrivez pas à rouler avec un 32 devant et un 51 derrière, n’est-ce pas parce que c’est trop raide, que vous n’êtes pas assez en forme ou encore parce que vous avez fait un mauvais choix de taille de plateau ?
Henry Bosch: “Je suis d’accord… et pas d’accord ! Tout le monde ne roule pas les mêmes trails, ni de la même façon. C’est pour cela qu’il y a le double, pour encore élargir les possibilités de certains bikers et leur permettre de découvrir plus. »
Oui, mais si on roule à moins de 4 ou 5 km/h, n’est-ce pas mieux de marcher ?
Henry Bosch: “Non, certains préfèrent toujours rouler, et j’en fais partie. Je suis un biker, pas un marcheur. Je roule parfois des marathons et pour ces longues distances, je préfère la sécurité d’un double. Je sais que le mono a de plus en plus de succès sur le marché, mais il y a encore une belle place pour le double. Beaucoup de bikers comme moi ont encore connu le triple, et ils n’ont aucun problème à gérer un dérailleur avant, que nous sommes fiers de faire évoluer encore. »
La tradition veut que la technologie du XTR « descende » ensuite vers les autres groupes dans les années qui suivent. Le XT est bien prévu l’an prochain, et quelles technologies seront reprises ? Puis, directement une autre question : quid du Di2 ?
Takao Harada: “Le timing précis n’est pas encore fixé, mais cela reste bien notre stratégie. Je travaille également sur le Di2, mais je ne veux pas non plus encore parler de délai. Je pense aussi que le Di2 peut apporter quelque chose en matière de confort, pour aider le biker à se concentrer sur son pilotage.”
Henry Bosch: “Le changement de vitesses avec le nouveau groupe XTR M9100 à câble est si souple et rapide que nous devons nous demander si le Di2 a encore une réelle valeur ajoutée. Surtout en mono, où il n’y a plus qu’un seul dérailleur. Le Di2 est et restera plus cher, et il doit donc offrir un gros avantage pour être réellement intéressant. S’il ne sert qu’à changer les vitesses, il faut alors se poser la question. Pour l’avenir de l’électronique, on pense donc à plus d’intégration, plus de connectivité avec d’autres composants du vélo. Si on regarde l’évolution des vélos, elle est incroyable. On descend aujourd’hui à fond les descentes techniques d’hier. Les nouvelles technologies doivent-être au service de cette évolution et du pilote, pour lui permettre d’aborder de nouveaux sentiers, de découvrir de nouveaux horizons. C’est dans ce sens que je pense que le Di2 doit offrir plus qu’un simple changement de vitesses à l’avenir. ”
Et le sans fil ?
Henry Bosch: “Si le sans-fil est la meilleure option pour le changement des vitesses, nous allons bien sûr le développer. Mais s’il faut équiper chaque composant d’une batterie, est-ce vraiment une valeur ajoutée et une simplification ? Si, avec une bonne configuration des câbles, tout fonctionne parfaitement, faut-il vraiment aller dans cette voie ? Ce sera aussi coûteux. Mais s’il s’avère que c’est pertinent, en effet, c’est sans doute d’abord sur le XTR qu’elle verra le jour. »
Takao Harada: “Nous aimons toujours laisser le choix. Nos équipes pro ont encore le choix entre l’ancien XTR Di2 ou le nouveau. Toutes ne sont pas encore passées sur le nouveau, mais on constate que quand un pilote l’a essayé, ensuite tous ses coéquipiers suivent ! Nous avons plus de teams partenaires cette année que lors des précédentes saisons, et donc plus d’athlètes. Ils pourront toujours choisir l’an prochain, mais je pense que tout le monde choisira le nouveau groupe. »
Photos : Irmo Keizer, Balz Weber & Jurgen Groenwals
Plus d’infos : www.ridextr.com
Et en (re)lisant notre présentation du groupe lors de sa sortie : dev.vojomag.com/presentation-shimano-xtr-m9100-12-vitesses-pour-le-xc-marathon-11-pour-lenduro/
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