Test | Look X-Track, Ritchey WCS XC & Shimano XT : trois pédales SPD à l’essai

Par Olivier Béart -

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Test | Look X-Track, Ritchey WCS XC & Shimano XT : trois pédales SPD à l’essai

Alors qu’il va doucement sur ses 30 ans, le standard SPD inventé par Shimano règne toujours en maître sur l’univers des pédales. Ouvert à d’autres marques, il est très largement utilisé aujourd’hui encore, même par certains qui ont tenté de suivre leur propre voie à une certaine époque. Dans ce test/match, Vojo a confronté la référence Shimano XT M-8000 à deux outsiders utilisant également cette plateforme SPD, les nouvelles Look X-Track et les Ritchey WCS. Verdict :

Si d’autres systèmes ont existé et existent toujours (Look, Time, Crank Brothers, Speedplay, HT,…), force est de constater que l’interface SPD règne en maître dans l’univers des pédales. Et que Shimano a su garder son leadership dans le domaine grâce à des produits performants, accessibles et surtout jouissant d’une enviable réputation de fiabilité. Mais la concurrence est forte et, ces derniers temps, quelques nouveaux modèles très intéressants sont sortis.

Parmi ces nouveautés qui utilisent les cales SPD, standard non protégé et qui peut donc être utilisé par tout qui le souhaite, nous avons sélectionné les Ritchey WCS XC Mountain utilisées notamment par un certain Nino Schurter, ainsi que les toutes nouvelles Look X-Track Carbon, pour les confronter à la référence Shimano XT M8000. Comment parviennent-elles à se démarquer ? Perçoit-on directement les différences entre des pédales utilisant le même principe de base ? Voici notre test longue durée sans concession de ces trois pédales SPD typées XC :

Look X-Track Race Carbon : la petite dernière aux grandes ambitions

Look, marque française bien connue, est tout simplement la créatrice des pédales automatiques, amenées sur la route du succès pour la première fois en route avec Bernard Hinault en 1984. Si la marque est toujours parmi les leaders du marché sur bitume, elle a par contre eu plus de mal à s’imposer en VTT. Après avoir commercialisé sa propre version des Egg-Beater Crank Brothers et testé un standard propre avec les S-Track, voilà que Look revient au bon vieux SPD avec son dernier modèle en date sorti juste après le Roc 2017, les X-Track.

Sur la balance, les Look X-Track Race ne sont pas spécialement légères malgré leur corps en carbone : 347g.  Ce n’est pas énorme, mais on s’attendait à mieux avant de les recevoir. Puis, quand on les a en mains, on comprend qu’elles sont nettement plus volumineuses que leurs concurrentes, ce qui explique en grande partie ce score sur la balance. Logique : il faut bien obtenir la surface d’appui quelque part !

Avant d’aller rouler, on installe les cales Look et sur notre première paire, nous avons eu la mauvaise surprise de constater que les vis sont de piètre qualité. Un vieux démon déjà constaté sur les X-Track. Mais il s’agissait visiblement d’un vieux stock envoyé avec les premiers exemplaires car par la suite, Look nous a envoyé des cales et vis définitives, et là plus de souci. Ouf.

Au niveau des sensations pures, les Look X-Track sont vraiment séduisantes. Avec elles, on sent qu’on roule sur autre chose que des Shimano. Aussi étonnant que cela puisse paraître, alors que les variations de la surface d’appui sont souvent difficiles à percevoir, ici, elles sautent aux yeux. Il n’y a aucun flottement, on est parfaitement maintenu, mais on sait bouger le pied quand on a envie de profiter de la liberté angulaire. Et c’est très agréable tout cela ! Sur papier, c’est aussi meilleur pour la transmission de la puissance, et donc pour les performances, mais on ne va pas vous sortir des chiffres alambiqués pour le prouver. A notre niveau, et au votre aussi sans doute, soyons humbles, cela importe assez peu. Par contre, côté sensations, là, croyez-nous, Look a réussi son coup et a surtout réussi à faire sentir sa différence avec Shimano, ce qui n’est pas une mince affaire.

Le clipsage et de déclipsage sont un peu plus « tendres » que sur des Shimano, et moins « métalliques » (avec une cage en composite, c’est assez logique nous direz-vous), mais c’est précis et on perçoit suffisamment clairement quand on rentre et quand on sort du mécanisme. Le réglage de la tension est efficace et offre une belle plage d’ajustement. Que ce soit avec des chaussures très typées compétition (Shimano SPhyre, Specialized S-Works) ou des modèles plus relax (Specialized 2FO Cliplite ou Lake d’hiver) aux crampons plus prononcés et à la semelle plus souple, les Look font très bien le job. Et malgré leur surface d’appui importante, le dégagement a été bien étudié, de sorte qu’elles n’accumulent que peu la boue. Quand il fait très froid, leur cage en composite accroche aussi moins les amas de terre et de glace qui s’agrippent plus volontiers à une cage métallique.

Côté fiabilité, nous devons être clairs : nous essayons les pédales Look X-Track Race Carbon depuis moins longtemps que les autres modèles de ce comparatif. Présentées en octobre, elles nous sont arrivées fin 2017, soit un peu plus de 3 mois d’essai contre 6 mois à un an pour les Ritchey et Shimano. Nous vous tiendrons au courant des suites au niveau de la fiabilité mais il y a déjà de quoi tirer quelques premiers enseignements, d’autant que le test hivernal a été éprouvant.

Au démontage, on perçoit que les deux roulements sont intacts et tournent librement. Par contre, dès l’origine, les Look ne sont pas les plus fluides du test, et cela ne s’est pas vraiment amélioré au fil des kilomètres, mais rien de dramatique. Et il faut garder à l’esprit que la fluidité à vide (qui est parfois trompeuse) et en charge (la plus importante car c’est quand on appuie fort que cette fluidité doit s’exprimer) sont deux choses différentes. On remarque que l’axe est un peu sale du côté de la manivelle, signe que quelques crasses ont pu s’infiltrer, mais sans aller jusqu’aux roulements. Nous n’avons noté aucune prise de jeu. Affaire à suivre, donc, mais les choses s’annoncent plutôt bien de ce côté.

Verdict

En général, toutes les pédales SPD se tiennent niveau sensations. Parfois, de petites différences se font sentir, mais les Look X-Track parviennent à se démarquer. Leur surface d’appui très importante se sent réellement et se montre très agréable, qu’on soit un pratiquant plus occasionnel utilisant des chaussures plus souples qui ne vont pas s’écraser complètement sur un corps de pédale trop petit, ou un compétiteur pointu pour qui ce critère est important. Pour cela, elles ont suscité un coup de coeur chez plusieurs de nos testeurs… au point que certains en ont directement commandé une paire pour leur usage personnel ! Si la fiabilité sur le long terme se confirme, on promet un très bel avenir à ces Look X-Track, tout à fait à même de faire de l’ombre à la référence Shimano, d’autant que leur prix est correct. Finalement, leur plus grande concurrence vient de l’intérieur avec les X-Track en composite qui offrent des caractéristiques proches (sur papier) pour un prix quasiment divisé par 2 !

Memo dimensions Look : largeur 54mm – longueur 65mm (corps 41mm) – hauteur appuis 18mm
Plus d’infos :  le site Looknotre présentation des pédales lors de leur sortie

Ritchey WCS XC Mountain : dans les cales de Nino

Elles vous disent quelque chose ces pédales Ritchey ? Normal : c’est le modèle que Nino Schurter utilise sur son Scott Spark et il a contribué à leur développement. Très proches visuellement des Shimano XTR, elles se veulent minimalistes tout en offrant une bonne surface d’appui. Pari réussi ?

Un des points forts de ces pédales Ritchey, c’est leur poids de 300g qui les place parmi les plus légères en SPD, mis à part quelques modèles à axe titane et cage en magnésium (bien plus fragile que l’alu dont est fait le corps des WCS XC). Elles existent aussi dans une version Comp XC simplifiée (roulements, finition,…) moitié moins chère et une trentaine de grammes plus lourde.

La finition des pédales Ritchey WCS XC Mountain est superbe, avec une teinte « titane satiné » et quelques touches de doré qui les démarquent au premier coup d’oeil. En plus d’être belle, cette finition est particulièrement durable, et après plus de 6 mois d’utilisation, dont notre trip au Québec, où elles ont goûté du caillou sans en souffrir le moins du monde. Clairement, elles sont presque comme neuves et ce sont sans conteste celles qui vieillissent le mieux esthétiquement.

Ritchey avance également l’argument de la fiabilité, avec un joint d’étanchéité du côté de la manivelle, un roulement annulaire à l’opposé et un roulement à aiguilles au centre. Au démontage, on s’aperçoit que tout est comme neuf aussi à l’intérieur. Graisse intacte, pas une impureté sur l’axe en acier : le bilan est parfait de ce côté.

Il n’y a pas non plus de prise de jeu. Par contre, un des caches (écrou doré) d’une des pédales s’est avéré très dur à retirer ; sans doute la pédale a-t-elle tapé et le filet s’est un peu écrasé car l’autre vient sans souci et donne accès facilement aux roulements pour un éventuel nettoyage.

Au niveau des sensations, contrairement aux Look, difficile ici de faire la différence avec des Shimano. Les sensations de clipsage et déclipsage sont très proches et assez fermes. Il faut cependant forcer plus le mouvement latéral du pied pour sortir et elles donnent le sentiment d’accrocher un peu. Une fois enclenché, l’appui est franc, mais on peut ressentir un léger flottement à la remontée, y compris avec des cales neuves. Quant à la surface d’appui, on la ressent comme dans la moyenne, sans plus.

Le réglage de la tension est bien placé (vis à l’abri des chocs) et efficace. Le dégagement dans la boue est très bon car les pédales sont bien ajourées, mais en cas de gel, la boue se colle sur elle (comme sur la plupart des pédales avec corps en aluminium).

Verdict

Côté fiabilité, finition et durabilité, les pédales Ritchey WCS XC Mountain sont une vraie réussite. Pour tout vous dire, on ne les attendait pas à ce niveau. Un peu plus chères que leurs concurrentes du jour, elles compensent aussi en étant plus légères. Par contre, côté sensations, elles peinent à se démarquer. Ce sont de bonnes SPD, mais elles n’apportent rien par rapport à Shimano sur ce point. Elles sont même un cran en dessous, tout en restant malgré tout agréables et tout à fait dignes d’intérêt si le rapport poids/fiabilité est votre critère principal.

Memo dimensions Ritchey : largeur 60mm – longueur 69mm (corps 43mm) – hauteur appuis 18mm
Plus d’infos : https://ritcheylogic.com/wcs-xc-mountain-pedal

Shimano XT M8000 : la référence sous pression

Shimano est et reste le maître incontesté de la pédale SPD. Si le fer de lance de la gamme est bien évidemment estampillé XTR, les pédales Shimano XT M8000 sont un choix privilégié par beaucoup car elles sont à peine plus lourdes, nettement moins chères et de conception plus récente avec une surface d’appui supérieure à celle de leurs grandes sœurs. Suffisant pour continuer à dominer ? 

Un peu plus hautes que les XTR, les pédales Shimano XT M8000 sont par contre un peu plus compactes. Ce qui ne les empêche pas d’offrir une surface de contact supérieure, proche des 300mm2, quand les XTR dépassent à peine les 200. En pratique, cela se sent peu, mais on a tout de même l’agréable sensation d’avoir quelque chose sous le pied et d’être bien accroché, sans mouvement parasite possible, mais sans restriction de la liberté angulaire non plus. Les Look X-Track font encore mieux sur ce point, mais c’est déjà vraiment bien dans ce cas-ci. La différence avec les séries 520 et 540 plus bas de gamme est directement perceptible et vaut le surcoût demandé pour les XT. A propos de coût, le tarif officiel des pédales Shimano XT est de 91,90€, ce qui en fait déjà les moins chères de ce comparatif, et il est en plus possible de les trouver à moins de 70€ en cherchant un peu.
Au niveau du clipsage et déclipsage, c’est évident, Shimano est toujours la référence. On est là sur un compromis parfait entre la fermeté nécessaire pour sentir quand on est accroché ou décroché, et la souplesse qui assure une mise en place du pied et un retrait sans effort démesuré. Un must. Mais si on est au-dessus des Ritchey sur ce point, les Look ne sont pas loin derrière !

Au niveau de la solidité, les pédales Shimano sont en général connues pour être a l’épreuve des balles. C’est vrai, mais nous avons tout de même constaté que le corps se marque facilement. De teinte foncée (sauf sur les points d’appui), il se raye facilement et sa belle couleur disparaît vite par endroits.

La surface de contact avec la chaussure a aussi tendance à s’user et, au bout d’un an, des marques en creux sont clairement visibles. Et on peut ressentir, petit à petit, un peu plus de flottement quand le pied est attaché.

A l’intérieur, Shimano adopte un principe qui lui est propre, avec des roulements à billes réglables montés sur l’axe et non sur le corps comme chez ses rivales. Si du jeu apparaît, ce qui finit toujours par arriver avec ce principe, il suffit d’ouvrir la pédale, de se munir de deux clés et de régler la précontrainte des billes avec les deux écrous en extrémité. Pratique, d’autant que la fréquence de cette opération est bien moindre qu’avant. En un an de test, nous n’avons pas dû y toucher et nos pédales n’ont toujours pas de jeu. La fluidité est excellente, tout comme l’étanchéité. Si la graisse a tendance à noircir, c’est plutôt à cause de particules de métal qui s’y mêlent.

Verdict

Les pédales Shimano XT M8000 font toujours office de référence au niveau des sensations de clipsage/déclipsage, ainsi que de la fluidité des roulements, mais elles sont par contre dépassées sur d’autres points par leurs concurrentes. Les Look sont plus agréables une fois qu’on est clipsé et les Ritchey nous semblent un cran au-dessus au niveau de la durabilité. Si elles restent fiables et solides, les pédales Shimano XT se détériorent vite visuellement et l’usure de la plateforme finit par se faire sentir quand on roule. Dommage car, même si les XT gardent leur statut de référence, il faudra que Shimano règle ces points sur la prochaine génération, au risque de voir leur leadership sérieusement vaciller. Reste un point sur lequel elles sont difficiles à attaquer : leur rapport qualité/prix.

Memo dimensions Shimano : largeur 60mm – longueur 69mm (corps 43mm) – hauteur appuis 18mm
Plus d’infos : https://bike.shimano.com

Conclusion

A l’issue de ce test confrontant trois pédales SPD, on se rend compte que si Shimano s’en sort la tête haute et conserve la palme du rapport qualité/prix, son leadership n’est plus aussi incontesté qu’avant. La Ritchey pêche un peu côté sensations pures, tout en ayant tout de même un fonctionnement plus que correct, mais elle a plusieurs atouts pour recueillir les préférences de certains : sa finition, sa fiabilité et son poids.

Enfin, Look a très bien réussi son coup avec les X-Track en parvenant à faire une pédale SPD qui n’est pas juste une SPD de plus mais carrément un modèle avec sa personnalité propre, qui offre des sensations au pédalage différentes et un cran au-dessus des classiques, Shimano en tête. Testées moins longtemps que les autres, elles doivent encore confirmer leur fiabilité à long terme, mais les premières indications mettent en confiance.

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Par Olivier Béart

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